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Politique - Juin 2013

Polichinelle travaille à la NSA

Résumé

Encore une affaire pour amuser la galerie. On se la joue terroriste ou dissident pour pas un rond. Nous ne sommes pas victimes de la NSA, seulement des films holywoodiens.

C'est une info du Gorafi ou quoi ? Edward Snowden, un employé contractant de la NSA, l'agence d'espionnage des communications américaine, révèle que toutes nos communications téléphoniques et Internet sont espionnées ! Je veux bien admettre qu'on n'y pense pas tous les jours, mais il se trouve que c'est justement le boulot des services secrets d'espionner les gens. S'ils ne le faisaient pas, on les paierait à rien foutre. En même temps, comme leur boulot est secret...

L'argument selon lequel on devrait espionner les personnes dangereuses, mais pas les citoyens (honnêtes), suppose bien évidemment que les espions, les terroristes et les (grands) délinquants préviennent la NSA pour éviter les dépenses inconsidérées des deniers publics. Ce souci les honore, c'est vraiment sympa de leur part.

Bon, la différence est que les nouvelles technologies de l'information et les capacités de stockage permettent d'espionner tout le monde, tout le temps. On pense au roman d'Orwell, Big brother, ou plus classiquement à la Stasi de la RDA ou au KGB de l'Union soviétique. Mais c'est justement le propre des services spéciaux de disposer des derniers moyens techniques pour remplir ces missions. Aurait-on oublié les gadgets de James Bond ? Quand les services sont démodés devant les moyens utilisés par leurs adversaires, les citoyens sont les premiers à s'en plaindre. On connaît le fameux exemple des bandits anarchistes de la Bande à Bonnot, avec leurs automobiles qui surclassaient les policiers à bicyclettes. Ils préfiguraient les hackers de l'Internet. Clémenceau avait créé les fameuses Brigades du Tigre. Les Américains ont créé la NSA.

L'époque est au complotisme et on se plaint de ne pas être informé. Cinéma ! On l'était parfaitement. Les médias ont fait leurs gros titres sur la révélation de cette intrusion dans la vie privée : 1) Ce sont eux qui sont censés nous informer, pas la NSA. 2) « Intrusion dans la vie privée » et « médias » nous rappelle quelque chose... Comme disent les Américains : « Les lecteurs ont le droit de savoir ! » Si on veut défendre les libertés, il faut d'abord ne pas avoir peur de tout. Comme je le disais récemment, tout le monde est toujours libre de dire ce sur quoi tout le monde est d'accord. Encore faut-il avoir quelque chose d'autre à dire.

Heureusement, tout le monde n'est pas aussi faux cul. De nombreux consultants sont venus rappeler à la télé que nous donnons nos données personnelles à Facebook, Google, etc., qui tracent nos goûts et nos déplacements (espérons que la NSA a de meilleurs logiciels de traitement de l'info...). Ils ont rappelé que les spécialistes étaient déjà au courant de l'importance du phénomène et que le véritable problème était plutôt l'espionnage industriel. L'information progresse quand même. On peut y voir un effet des nouveaux médias et de la concurrence entre les experts qui ont besoin d'avoir quelque chose à dire pour être crédibles. Le seul intérêt de cette affaire est de permettre de réviser les connaissances de base.

Un problème soulevé par certains (dont Médiapart) est l'existence de contractants privés qui constituent un secteur industriel à part entière aux USA. C'est un marché porteur actuellement. Mais ce n'est pas la peine d'être parano. Si l'espionnage était le fait d'agences publiques comme en France, avec le secret défense, la transparence ne serait pas plus grande, surtout avec cinq millions de personnes accrédité secret-défense aux États-Unis. Objectivement, le seul inconvénient des affaires qui doivent rester secrètes, c'est que ça permet de dissimuler les conneries. Mais, par définition, les conneries ne sont pas volontaires et elles sont inévitables de toute façon.

Mais franchement, ce n'est donc pas la peine de surjouer l'indignation : 1) Dans le sens des libertés pour Edward Snowden, qui aurait bien dû se douter que travailler pour la NSA consistait à espionner les gens ; 2) Contre sa trahison pour ceux qui s'opposent à la révélation de ces secrets de Polichinelle. L'Amérique est vraiment le pays de Bambi, et le recrutement de personnel accrédité secret défense laisse à désirer. Mais c'est ça l'inconvénient du secret : il faudrait plutôt investir davantage dans l'information du public. Dans le renseignement, il ne faut pas oublier que la majorité de l'information est disponible. On peut réfléchir un peu aussi.

Au moins, on ne peut pas accuser Snowden d'intelligence avec l'ennemi.

Jacques Bolo

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