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Politique / Urbanisme / Conneries - Juin 2018

Macron abaisse le niveau

Résumé

Encore une bourde de Macron. L'inconvénient des technocrates est d'être beaucoup plus coupés des réalités que les politiques, qui ont au moins tendance à faire un peu gaffe.

On pouvait penser que le volontarisme excessif d'Emmanuel Macron consistait à mettre la barre plus haut. On se trompait. Ne voilà-t-il pas que le gouvernement, pour simplifier les procédures de construction, a fait voter une restriction des normes d'accessibilité pour les handicapés dans les logements neufs. Contrairement à l'obligation antérieure d'une accessibilité de 100 % pour les logements nouveaux, seuls 10 % seront désormais concernés, en vertu de l'article 18 de la nouvelle loi Elan (Évolution du Logement, de l'Aménagement et du Numérique) adopté vendredi 1er juin 2018. L'obligation précédente datait de 1978, dont René Lenoir, secrétaire d'État à l'action sociale de Valéry Giscard d'Estaing de 1974 à 1978 qui vient justement de mourir l'année dernière, le 16 décembre 2017, avait été l'artisan initial, avec un complément sous Chirac en 2005.

L'inconvénient d'avoir une majorité absolue, mythe fondateur de la Cinquième République, est que cela permet de voter n'importe quelle sottise. C'est à se demander si les députés ont le moindre sens commun. Outre la mesquinerie de cette mesure, on imagine que sa logique repose sur l'idée que seulement 10 % des personnes sont concernées. Ineptie minable du calcul technocratique ! Même si c'était le cas, il est bien évident que les handicapés ne pourraient donc plus se rendre dans 90 % des nouveaux appartements sans subir des difficultés plus ou moins importantes, jusqu'à l'impossibilité totale. Cela signifie aussi que les handicapés ne peuvent pas avoir des amis valides. La critique actuelle déjà hypocrite du communautarisme est oubliée pour créer de l'entre-soi chez les valides.

Cette mesure est d'autant plus absurde que le vieillissement de la population augmente forcément les difficultés de mobilité. Mais aussi, il ne faut pas oublier que la réalité du handicap peut frapper n'importe qui à tout moment, de manière temporaire ou définitive. Une personne accidentée de la route, du travail ou des loisirs devra donc engager des frais supplémentaires si elle veut rentrer chez elle. Cela augmentera donc mécaniquement les primes d'assurances pour pallier ces inconvénients, mais aussi le coût du recours aux aides médicales.

Les promoteurs immobiliers qui ont influencé le gouvernement pour faire adopter cette mesure manquent au moins d'imagination. Outre qu'ils semblent militer pour une baisse de la qualité de leurs prestations, ils semblent dire que des portes moins larges suffisent alors qu'une augmentation générale serait plus économique. À ce compte, on pourrait tout aussi bien prévoir des portes ou plafonds plus bas en se fondant sur la taille moyenne de la population et en oubliant les personnes de grande taille. Pourtant, des prestations optimales permettent une valorisation des appartements à la revente en ne les limitant pas à un segment du marché. La perspective de financer la construction par l'accession à la propriété des logements sociaux est donc menacée si la qualité des appartements se dégrade. Cette inconséquence est sans doute issue d'une logique de bailleurs sociaux qui peuvent se permettre de dégrader le service fourni puisqu'ils n'en subissent pas personnellement les conséquences. Ils peuvent même demander une augmentation de salaire puisque cette idée risible permet de baisser les coûts. En bref, on peut dire que les députés ont tout faux !

Le président Macron a eu l'occasion de dire qu'il ne concevait pas sa fonction comme celle d'un syndic de copropriété. J'ai déjà dit qu'il avait tort. Un président n'a pas à régenter tous les pans de la vie privée des citoyens qui sont bel et bien des copropriétaires de l'État. La difficulté qu'il a soulignée est effectivement le risque de blocage, mais elle ne se contourne pas par des diktats inspirés par des mauvais conseillers, outre cette mauvaise habitude de l'omniprésence de l'État. La liberté d'action doit appartenir aux agents privés (à leurs risques et périls) dans un cadre défini par la collectivité et non l'absurde contraire d'une action collective définie par des intérêts qu'on suppose privés, pour ne pas dire simplement des lubies de lobbies (celui de l'automobile était longtemps contre la ceinture de sécurité qui s'est généralisée par la suite) ou le bon plaisir de responsables irresponsables, qu'ils soient nationaux ou locaux.

Jacques Bolo

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